Yannis Lantheaume Avocat
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Réforme à venir du contentieux des visas

Droit des étrangers

Par deux décrets du 29 juin 2022 (ici et ici), le gouvernement a procédé à une réforme d’ampleur du contentieux des visas.

Cette réforme s’appliquera pour toutes les décisions de refus de visas prises à partir du 1er janvier 2023.

Il est donc temps de faire un point sur les dispositions qui seront applicables à compter de cette date.

Il sera préalablement précisé que les mêmes décrets viennent fixer les modalités de recours contre les refus d’autorisations de voyage (ETIAS – système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages), mais ce système n’étant pas encore entré en vigueur, nous y reviendrons ultérieurement.

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Tout d’abord – et c’est une nouveauté de taille -, les modalités de recours seront désormais distinctes selon que l’on attaque un refus de visa court séjour (visa Schengen) ou de long séjour.

Une décision de refus de visa de long séjour continuera de devoir être contestée devant la commission de recours contre les refus de visa d’entrée en France (CRRV), mais, désormais, un refus de visa Schengen se contestera devant le sous-directeur des visas de la direction générale des étrangers en France (DGEF).

À la différence de la CRRV, qui ne peut que rejeter le recours ou recommander au ministre de délivrer le visa demandé (le ministre restant libre de délivrer ou non le visa), le sous-directeur des visas pourra quant à lui donner directement instruction à l’autorité consulaire de délivrer le visa court séjour sollicité.

Ensuite, désormais tous les recours contre les refus de visa devront avoir lieu dans les 30 jours suivant la notification de la décision de refus, alors que le délai était auparavant de deux mois.

Les recours pourront être effectués par la personne qui fait l’objet de la décision de refus, par un mandataire dûment habilité, ou – nouveauté – par toute personne établissant avoir un intérêt direct et certain à contester la décision.

Si le pouvoir réglementaire a réduit les délais de recours en les divisant carrément par deux (!), en revanche l’administration (la CRRV ou le sous-directeur des visas, donc) auront quant à eux toujours deux mois pour statuer sur les recours…

Si la CRRV rejette le recours, la personne disposera d’un délai de deux mois – délai inchangé – pour saisir le tribunal administratif de Nantes, mais attention, les « délais de distance » prévus par le code de justice administrative ne seront plus de mise pour les personnes résidant outre-mer ou à l’étranger. Aucune prorogation de délai ne sera donc possible.

Enfin, s’agissant des refus de visa « court séjour », toute possibilité d’appel est supprimée.

Dès lors, si le tribunal administratif de Nantes rejette le recours contentieux, seule la voie de la cassation devant le Conseil d’État sera ouverte.

Pour résumer, comme bien souvent l’État écorne le droit au recours des justiciables (délais, voie de recours, etc.) pour rendre service à l’administration qui, en l’absence de moyens supplémentaires et face à l’augmentation du nombre de demandes de visa, n’arrive plus à faire face.

Il sera intéressant de voir si saisir le sous-directeur des visas de la DGEF est aussi inutile que de saisir la CRRV, organe dont il a déjà été dit ici qu’il ne servait pas à grand-chose si ce n’est à coûter de l’argent au contribuable.

Heureusement, bien souvent le tribunal administratif de Nantes annule des décisions rejetant les recours contre les refus de visa.

Il semble même qu’en matière de droit des étrangers, le contentieux des visas soit l’un de ceux qui donnent lieu au taux d’annulations juridictionnelles le plus important, preuve s’il en était encore besoin que tant les autorités consulaires que la CRRV n’appliquent pas correctement la loi et les conventions internationales.

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Yannis Lantheaume
Avocat au barreau de Lyon
www.lantheaume-avocat.fr

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